Le Centre commun de recherche de la Commission européenne (JRC / Joint Research Centre) a publié en janvier 2024 un rapport prospectif sur le futur de la bioéconomie dans l’Union européenne. Les travaux mettent en lumière différentes trajectoires vers une économie durable et neutre en carbone d’ici à 2050, dans plusieurs secteurs : agriculture, forêt, pêche et aquaculture, énergie, etc. L’exercice a été initié en 2019 sous l’égide du Knowledge Centre for Bioeconomy et repose sur des ateliers réunissant des porteurs d’enjeux publics et privés (organisations non gouvernementales, think-tanks, réseaux d’entreprises). Dans un premier temps, quatre scénarios de transition vers une bioéconomie durable ont été construits (schéma ci-dessous).
Ces derniers ont ensuite été explorés à l’aide du Scenario Exploration System (SES), un jeu sérieux (serious game) (photo ci-dessous).
Dans le scénario « Do It for Us [La faire pour nous] », la transition s’opère via des instruments fiscaux et réglementaires (logique top-down). La production agricole diminue, la consommation se reporte sur des produits de plus haute gamme, notamment en agriculture biologique (70 % de la surface agricole en 2050), les prix et les inégalités augmentent. Dans le scénario « Do It Together [La faire ensemble] », la collaboration avec la société civile (citoyens et consommateurs) permet de limiter l’augmentation des prix et l’alimentation se recentre sur des produits locaux. Les politiques publiques interviennent peu dans le scénario « Do It Ourselves [La faire nous-mêmes] », où la réorientation des systèmes alimentaires autour de circuits locaux est due à la forte influence de mouvements sociaux (logique bottom-up). En dehors de l’Union européenne, cependant, la demande en protéines animales et en produits transformés continue d’augmenter, menaçant la sécurité alimentaire. Enfin, dans le scénario « Do What Is Unavoidable [Faire ce qui ne peut être évité] », la transition n’a pas lieu et les mouvements sociaux sont fragmentés. La pression sur les écosystèmes et sur la biodiversité augmente partout dans le monde, la sécurité alimentaire n’est plus assurée.
L’analyse du jeu sérieux souligne l’importance de trois leviers pour atteindre les objectifs de transition : 1) la collaboration et le partage d’informations entre les porteurs d’enjeux ; 2) la mobilisation du niveau local et des acteurs isolés (par exemple en zone rurale) ; et 3) l’établissement d’un débat avec les consommateurs afin d’influencer la demande en produits bas-carbone, y compris alimentaires.