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De la science à la politique : l'enjeu climatique aux États-Unis

Cet article fait partie de la revue Futuribles n° 255, juillet-août 2000

Le réchauffement climatique, même si ses causes et ses conséquences demeurent sujettes à controverse, du fait de ses implications environnementales, politiques et économiques, est devenu l’objet d’un processus de négociations internationales inédit. Celui-ci a notamment abouti à l’établissement d’un protocole au travers duquel un certain nombre de pays signataires s’engagent à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2008-2012. Ainsi en est-il des États-Unis où, toutefois, la mise en oeuvre de cette mesure bute sur d’importantes résistances.
Eugene Skolnikoff examine ici quels sont les principaux facteurs qui font obstacle au choix politique qui s’impose dans ce pays. Il en distingue principalement six :
– la subsistance d’incertitudes scientifiques quant à l’impact réel des activités humaines sur le climat, incertitudes habilement exploitées par des acteurs mus par des intérêts politiques et économiques différents ;
– la structure et le fonctionnement du gouvernement américain, lui-même paralysé par ses propres contradictions et soumis aux pressions d’acteurs enclins à juger de la qualité des arguments scientifiques en fonction de leurs préférences politiques ou idéologiques ; gouvernement qui se trouve au demeurant confronté au difficile arbitrage entre le court, le moyen et le long terme ;
– l’incertitude pesant toujours sur l’évaluation de l’impact éventuel de cet effet de serre, des coûts économiques qui peuvent en résulter et, plus généralement, des coûts et bénéfices des mesures qui pourraient être adoptées ;
– le cadre institutionnel international, l’engagement particulier pris par les pays signataires du protocole de Kyoto, engagement vécu comme  » limitant la souveraineté de la nation américaine  » et non assorti d’une clause de réciprocité de la part des pays en développement ;
– le rôle des médias et de l’opinion publique qui se délectent des questions controversées ou apocalyptiques et qui, en l’absence d’événements majeurs emportant l’adhésion collective, entretiennent la confusion ;
–  » la politique politicienne  » et le fait que l’effet de serre est devenu un objet de débat entre les républicains et les démocrates.
Cet article est très révélateur s’agissant des errements de la décision publique au regard d’enjeux qui font l’objet de polémiques scientifiques. Eugene Skolnikoff montre très clairement quelles sont les résistances que rencontre la mise en oeuvre d’une politique permettant aux États-Unis de remplir ses engagements vis-à-vis du risque climatique, le doute ainsi entretenu compromettant la négociation, au plan international, d’une mesure de  » bonne gouvernance « .

#Climat #États-Unis