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De la croissance au développement. À la recherche d'indicateurs alternatifs

Cet article fait partie de la revue Futuribles n° 281, décembre 2002

On se souvient des soixante-huitards proclamant qu’on ne  » tombe pas amoureux d’un taux de croissance  » et que le produit national brut (PNB) ne saurait être assimilé au bonheur national net… La critique de nos instruments de mesure de la performance des nations, et de ce que certains dénoncèrent comme  » l’évangile du progrès  » mesuré à l’aune d’indicateurs économiques, était donc lancée.
Presque 40 ans plus tard, avons-nous vraiment réussi à nous affranchir de cette manière de compter ? Pas vraiment, affirme Jean Gadrey qui, reprenant la critique du produit intérieur brut (PIB) auquel on se réfère davantage aujourd’hui, rend compte ici des progrès qui malgré tout ont été accomplis en vue d’établir d’autres indicateurs synthétiques, le plus connu d’entre eux étant sans doute  » l’indicateur de développement humain  » (IDH) établi par le Programme des Nations unies pour le développement.
L’auteur, tout en soulignant d’entrée de jeu que  » le choix des pondérations des diverses variables qui composent un indicateur, tout comme le choix des variables qui comptent, est un enjeu de débat public et de confrontation de points de vue, sur ce qu’il faut compter et sur ce qui compte le plus « , présente ici les efforts accomplis ces dernières années pour développer de nouveaux indicateurs qui rendent mieux compte du progrès social et/ou de l’impact des activités humaines sur l’environnement. Il nous expose les nouveaux indicateurs synthétiques qui ont pu être récemment développés qu’il classe en trois catégories :
– les indicateurs centrés sur les questions de développement humain et/ou social, sans monétarisation systématique des variables ;
– les indicateurs inspirés prioritairement par des préoccupations environnementales, sans monétarisation systématique des variables ;
– enfin les indicateurs visant à enrichir ceux des comptes nationaux par des additions et/ou des soustractions de variables monétarisées, avec des variantes faisant une place plus ou moins grande aux critères environnementaux.
Soulignant que la recherche sur les indicateurs synthétiques de développement connaît un nouvel essor depuis la deuxième moitié des années 1990, il décrit ceux de ces indicateurs synthétiques qui lui paraissent les plus prometteurs, montrant au passage sur quelle base ils sont établis et quel crédit il est possible de leur accorder. Son essai est particulièrement bienvenu à un moment où un nouveau courant de pensée apparaît (voir, en France, les travaux de Dominique Méda et de Patrick Viveret, par exemple) qui nous invite à  » reconsidérer la richesse « , à mieux prendre en compte le niveau réel de développement économique et social, mais aussi environnemental, non seulement de nos pays mais également de nos organisations. Cet article rejoint donc, à de nombreux égards, les travaux qui sont menés, y compris désormais au sein des entreprises, en vue d’améliorer nos systèmes comptables et d’être moins prisonniers des seules mesures faites à l’aune des échanges marchands.

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