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Climat : vers un point de basculement ?

Un point de basculement va-t-il bientôt être atteint sur le plan climatique ? Ce concept (tipping point en anglais) traduit l’idée que des seuils de non-retour existent dans la dégradation du climat, au-delà desquels ce dernier ne pourra jamais se régénérer et retrouver ses fonctions fondamentales.

Cette hypothèse a été évoquée pour la première fois par le GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) il y a 20 ans, et est depuis envisagée régulièrement par des chercheurs et relayée par Futuribles. Elle vient à nouveau d’être évoquée par des chercheurs publiés dans Nature, plus alarmistes que jamais.

À la fin des années 1990, le GIEC considérait que des points de non-retour dans le système climatique mondial pourraient être atteints si le réchauffement dépassait 5 °C d’ici la fin du XXIe siècle (par rapport à l’ère préindustrielle). Mais, dans ses deux derniers rapports (de 2018 et 2019), il suggère que ces points de bascule pourraient être atteints même si le réchauffement climatique ne dépasse pas 1 °C à 2 °C.

Il n’y aurait en réalité pas un mais plusieurs tipping points climatiques, en fonction des milieux et des régions du globe. L’un d’entre eux pourrait déjà avoir été atteint en Antarctique Nord, compte tenu de la vitesse de la fonte des glaces. S’il se confirme, un « effet domino » pourrait s’observer, conduisant à une hausse du niveau de la mer pouvant atteindre jusqu’à trois mètres au cours des prochains siècles. La hausse pourrait même être deux fois plus élevée en cas de déstabilisation durable de la zone glaciaire de l’Antarctique Est. La fonte accélérée des glaciers du Groenland fait craindre un phénomène similaire dans cette région, qui conduirait lui aussi à une très forte élévation du niveau de la mer (jusqu’à 7 mètres).

En d’autres termes, selon ces chercheurs, la hausse du niveau des mers pourrait atteindre 10 mètres d’ici quelques siècles…

D’autres points de bascule pourraient selon eux être rapidement observés :

– la quasi-totalité des coraux tropicaux pourraient disparaître avec un réchauffement de + 2 °C, entraînant des pertes de biodiversité encore difficiles à anticiper ;

– alors que 17 % de la superficie de l’Amazonie a déjà disparu, le seuil à partir duquel des pertes irréversibles de biodiversité pourraient être atteints varie de 40 % à 20 % selon les estimations.

Des effets domino pourraient se multiplier, l’atteinte de points de bascule dans certains écosystèmes accentuant la probabilité de basculement dans d’autres. Par exemple, l’Amazonie, les forêts boréales et le permafrost deviennent de nouvelles sources d’émissions de gaz à effet de serre, qui accentuent encore le réchauffement climatique.

Illustration de quelques effets domino dans les dégradations du climat mondial

Source : Nature.

Selon les chercheurs, la conjonction des points de bascule risque de conduire la planète vers un état climatique inédit, beaucoup plus hostile à la vie. Ils considèrent néanmoins que ce scénario catastrophe peut encore être évité grâce à une réduction rapide et massive des émissions mondiales de gaz à effet de serre.

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