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Global Grain Deal : les céréales font la paix du monde

Scénario-fiction

Notre conseiller scientifique Sébastien Abis vient de publier Géopolitique des céréales [1], un ouvrage consacré aux questions géopolitiques en lien avec la production, la consommation et les échanges de céréales. Y sont proposées 40 fiches illustrées donnant des repères et clefs de compréhension du monde à l’aune de la ressource stratégique que représentent les céréales pour l’alimentation. Parmi ces fiches, certaines proposent des scénarios-fictions imaginant divers développements géopolitiques liés aux céréales. Cette note reprend l’un de ces scénarios-fictions, celui dans lequel les céréales seraient devenues un vecteur de paix sur la scène internationale [2]. Futuribles

En 2030, l’Organisation des Nations unies (ONU) annonce que l’agenda mondial du développement durable, défini et instauré 15 ans plus tôt, ne s’est pas concrétisé, quand bien même de nombreux progrès ont été enregistrés dans le cadre des 17 objectifs fixés (ODD), qui ont pour beaucoup structuré la grille des relations internationales contemporaines. Le plus grand échec concerne l’ODD numéro 2, qui prévoyait d’éliminer la faim et d’assurer la sécurité alimentaire. Il est donc décidé d’en faire l’absolue priorité d’un nouveau cycle d’engagements.

L’alliance HIF (Human Intelligence for the Future)

Quand les chefs d’État et de gouvernement se réunissent à New York en septembre 2030, à l’occasion de la 85e assemblée générale des Nations unies (AGNU), l’atmosphère est à la désolation. Il faut dire que la décennie 2020 aura été des plus éprouvantes. À plusieurs reprises, la planète a tremblé. D’abord avec une pandémie qui a tétanisé les sociétés et rappelé la fragilité de la vie en matière de santé. Ensuite avec des guerres déclenchées sur tous les continents de la part de régimes autoritaires qui ont revendiqué une révision des frontières et convoité des ressources, réveillant de vieux démons de l’Histoire.

Si la désoccidentalisation de la marche du monde est structurelle, en revanche, le non-respect du droit international et l’usage de la force pour transformer des équilibres ont été des identifiants stratégiques de cette décennie. Qui plus est, celle-ci aura été émaillée de catastrophes multiples liées au changement climatique, avec des déplacements de population en masse et des coûts économiques exorbitants. Douze dates clefs émaillent ce parcours terrible (détaillées en encadré en fin d’article). En 2029, pour des raisons électorales mais aussi médicales, plusieurs pays connaissent une transition notable dans le profil de leurs dirigeants. Certains conflits s’estompent, même si les conditions de la paix restent précaires. Mais le ton est à l’accalmie et à la recherche d’un nouveau dialogue international. C’est dans cet état d’esprit que l’AGNU de 2030 se prépare.

Il y est décidé de mettre en place une alliance internationale et horizontale, publique-privée, pour la sécurité humaine et celle de la planète, dont le nom de code rapidement popularisé devient HIF pour Human Intelligence for the Future, à la fois parce qu’il suggère une hypothèse en anglais (if : et si…) dans un contexte traumatisé qui cherche des lueurs d’espérance, et parce qu’il souligne la centralité du facteur humain pour réussir et faire ensemble dans un monde où l’intelligence artificielle et les robots tendent à prendre trop de pouvoir. L’année 2030 sonne donc un peu comme un moment charnière où tempérance, bienveillance, bon sens et confiance réémergent à la surface du globe et au sein des sociétés.