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IA : notre ambition pour la France

Analyse de rapport

La Commission de l’intelligence artificielle (IA), présidée par Philippe Aghion (économiste) et Anne Bouverot (École normale supérieure), a rendu son rapport au président français le 13 mars 2024. Sous le titre IA : notre ambition pour la France, le texte a bénéficié d’un large exercice de consultation et comporte un diagnostic de la situation, un plaidoyer en faveur d’une action des pouvoirs publics et une liste de propositions concrètes et chiffrées.

Commission de l’intelligence artificielle, IA : notre ambition pour la France, rapport au gouvernement français, mars 2024, 130 p.

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Le rapport s’ouvre sur une introduction didactique pour rappeler la généalogie de l’IA, les conséquences de celle-ci et les raisons de l’intervention des pouvoirs publics. L’IA est replacée dans la dynamique de la transition numérique en cours et les interrogations que ces technologies suscitent sont explicitement reprises. La France et l’Europe sont en retard dans ce domaine et une attitude volontariste est nécessaire. Avec ses industriels et ses talents, la France pourrait tirer profit de l’arrivée des systèmes d’IA générative, une technologie de rupture, pour rejoindre le peloton de tête dans la compétition en cours, et assurer la prospérité et la souveraineté du pays. Car c’est bien de cela dont il s’agit : l’IA est désormais une technologie incontournable, comparable à ce qu’a été l’électricité en son temps. L’ignorer conduirait le pays à perdre les opportunités économiques d’un secteur dynamique, à subir la captation de sa valeur économique par des acteurs étrangers, et enfin à voir s’affaiblir tous les autres secteurs, faute d’accès à une technologie habilitante [1] puissante.

La suite du rapport est organisée en deux parties qui introduisent chacune des 25 recommandations de la Commission. Sous le titre « Dédiaboliser l’IA sans pour autant l’idéaliser », la première partie reprend les sujets d’inquiétude des citoyens à propos de l’incidence de ces technologies en matière d’emploi, d’information ou d’environnement ; elle évoque même le risque de perte du contrôle humain ou encore la stratégie à adopter face aux mutations qui s’annoncent, et la conduite à tenir vis-à-vis des géants du Web qui défient l’autorité des États. Face à ces inquiétudes, il est proposé d’agir pour que les citoyens apprivoisent l’IA individuellement et se l’approprient collectivement. Cela prendra la forme d’un plan de sensibilisation et de formation de la nation avec l’organisation de débats à tous les niveaux, la structuration de l’offre de l’enseignement supérieur et l’intégration systématique de l’IA dans les programmes de formation continue.

La seconde partie intitulée « Humanisme, souveraineté, responsabilité : innovons, déployons et maîtrisons l’IA » se situe au niveau des responsabilités gouvernementales. Elle s’articule en trois axes. Le premier porte sur une mobilisation de l’innovation au service des citoyens. Ici, il faut faire confiance aux capacités humaines de compréhension et d’adaptation. Précisément, l’IA peut être un facteur de développement humain et social, par exemple pour mieux apprendre, travailler plus intelligemment ou encore soigner plus efficacement. Et son déploiement sera facilité par la formation — y compris dans les domaines de la création —, le renforcement de l’infrastructure numérique publique, et en privilégiant la santé et l’éducation comme domaines prioritaires de sa diffusion.

Le second axe s’adresse à l’écosystème de l’IA, d’abord pour s’assurer des moyens financiers nécessaires. C’est le premier défi pour les entrepreneurs de start-ups en Europe : le rapport plaide pour une réorientation des investissements, y compris par le recours à une part de l’épargne des Français. Concernant les capacités de calcul qui jouent un rôle déterminant dans l’IA, le rapport préconise de faire de la France un pôle de développement du calcul à haute puissan...