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Substituts végétaux : décryptage d’une dynamique ambiguë

Note de veille

Au sein des pays occidentaux, les consommateurs sont de plus en plus préoccupés par les conséquences de leur alimentation, notamment des produits d’origine animale, qui cumulent enjeux pour la santé humaine, impacts environnementaux et problématiques liées au bien-être animal. En réponse, les industries agroalimentaires (IAA) et la FoodTech proposent régulièrement de nouvelles alternatives végétales, avec des innovations.

Sur ce marché très dynamique, on observe aujourd’hui une évolution à deux vitesses :

  • d’un côté, un fort engouement initial pour l’offre et de solides perspectives de croissance théorique ;
  • de l’autre, des ventes récemment décevantes, ainsi que des critiques croissantes concernant la valeur ajoutée, la durabilité et la qualité gustative des produits proposés.

Ce contraste est une occasion d’interroger les forces et les limites des réponses de la FoodTech et des IAA pour contribuer à la végétalisation de l’alimentation.

Dans son rapport de 2022, le GFI (Good Food Institute Europe) estime que le chiffre d’affaires du marché des produits transformés à base de protéines végétales pourrait atteindre de 9,37 milliards de dollars US en 2024 et jusqu’à 15,99 milliards d’ici 2029. Il s’agit bien sûr de prévisions reposant sur une confirmation du dynamisme actuel du secteur. En France, ce marché atteint 425,7 millions d’euros en 2022, soit une progression de 5 % par rapport à 2020, faisant de l’Hexagone le cinquième marché européen. Au niveau mondial, les investissements ont été multipliés par 7,8 entre 2017 et 2022. En 2019, la valeur de l’action de Beyond Meat, licorne américaine de la Silicon Valley et un des leaders du marché mondial, est montée jusqu’à + 734 % par rapport à son prix d’introduction.

Néanmoins, ces prévisions et cet engouement initial des marchés pour certains acteurs contrastent avec les difficultés rencontrées par le secteur dès 2022, Forbes allant jusqu’à annoncer la mort du marché. Beyond Meat a annoncé une chute de ses ventes de 30,5 % au deuxième trimestre 2023 et de 34 % au troisième trimestre. La valeur de son action en Bourse est descendue jusqu’à 5,58 dollars US, alors que la valeur d’introduction était de 25 dollars US (en mars 2024, elle valait 8,1 dollars US).

Facteurs moteurs

Plusieurs éléments permettent de comprendre les ambiguïtés de cette dynamique. D’un côté, un certain nombre de tendances contribuent au potentiel du marché des produits transformés à base de protéines végétales :

  • Les attentes des consommateurs : une étude de la Banque européenne d’investissement de 2021 rapportée par BpiFrance indiquait que 80 % des Français souhaitent modifier leurs habitudes alimentaires. Selon Harris Interactive, 57 % affirment avoir réduit leur consommation de viande depuis 2021 et 39 % (+ 9 % par rapport à 2021) souhaitent la diminuer d’ici 2027, tandis que selon Bloomberg, 40 % souhaitent consommer plus de produits vegan. Néanmoins, ces intentions restent globalement en décalage avec les comportements réels.
  • La multiplication des travaux mettant en avant la nécessité de réduire la consommation de protéines animales dans les pays développés : par exemple, dans son rapport de 2020 sur les régimes alimentaires sains et durables, l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) préconise la réduction des produits animaliers. Il en va de même du dernier Programme national nutrition santé (PNNS) français. Les modélisations du GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) indiquent aussi un lien entre baisse de la consommation de protéines animales et réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES).
  • Un décalage entre la recherche d’une alimentation plus saine et durable et les freins pour y parvenir : d’après Ifop/nu3, 60 % des Français associent l’amélioration de leur alimentation à une charge mentale et 45 % trouvent que c’est difficile au quotidien. Les alternatives végétales v...