Revue

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Penser forêt

Agir contre l’anthropocène

Analyse de livre

En ces temps de changement climatique qui s’avère plus sévère qu’envisagé, la forêt est une ressource cruciale par de nombreux aspects. Les forêts stockent du carbone puisqu’elles contiennent 81 % du carbone stocké dans la biomasse vivante de la biosphère. Les arbres dépolluent : un hectare de forêt filtre 50 tonnes de poussières par an, stocke 338 tonnes de CO2, produit 21 tonnes d’oxygène et filtre 1 000 mètres cubes d’eau.

Perron Daniel et Van Peteghem Gilles, Penser forêt. Agir contre l’anthropocène, La Tour d’Aigues : L’Aube, octobre 2023, 200 p.

La forêt est aussi un réservoir de biodiversité hébergeant en France, outre 120 espèces d’oiseaux ou 73 espèces de mammifères, les deux tiers de la flore du pays. Dans le monde, selon la FAO (Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture), elle constitue l’habitat de 80 % des amphibiens, 75 % des espèces d’oiseaux et 68 % des espèces de mammifères, mais aussi de nombre de molécules ou d’espèces dont nous ne connaissons pas toutes les caractéristiques.

La forêt régule le régime des eaux, notamment via l’évapotranspiration : des chercheurs de Wageningen cités dans ce livre ont montré que la restauration des arbres à grande échelle modifie la disponibilité des cours d’eau, au niveau tant local que continental. En outre, une ripisylve [1] le long des rivières protège les cours d’eau des pollutions agricoles par filtration. Les arbres permettent le renouvellement des sols en nutriments. Ils assurent la retenue des pentes en montagne : le projet européen Rock the Alps a montré qu’au moins un arbre sur quatre doit être considéré comme un ouvrage de protection contre les risques naturels, en particulier les chutes de blocs. Les services écosystémiques de la forêt sont donc particulièrement nombreux en complément de ses services productifs (bois d’œuvre ou énergie) et récréatifs (chasse ou promenade). D’où la nécessité de considérer les écosystèmes forestiers comme des biens publics stratégiques, ne serait-ce qu’au regard de leur influence sur l’eau. En effet, une forêt a aussi un impact positif en cas de pluies exceptionnelles : les feuilles qui interceptent la pluie limitent son effet mécanique sur le sol et ainsi favorisent l’infiltration ; le tissu racinaire agit comme une éponge et consolide le sol.

Pourtant, la forêt est en danger. À l’échelle mondiale, la déforestation se poursuit souvent pour produire le soja de nos élevages ou de l’huile de palme, même si elle ralentit. À l’inverse, sa surface augmente en Europe et notamment en France (quatrième surface forestière d’Europe) où elle a doublé en un siècle. Mais son état sanitaire se dégrade avec le changement climatique et les sécheresses estivales plus sévères : un état des lieux de 2022 en Fr...