Revue

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Carbone fossile, carbone vivant

Vers une nouvelle économie du climat

Analyse de livre

Dans Carbone fossile, carbone vivant, Christian de Perthuis résume et articule les principaux enjeux relatifs à l’atteinte de la neutralité carbone, à la préservation des limites planétaires et au développement humain. L’économiste de l’environnement y livre une grille d’interprétation originale de ces phénomènes.

Perthuis Christian (de), Carbone fossile, carbone vivant. Vers une nouvelle économie du climat, Paris : Gallimard (hors-série Connaissance), octobre 2023, 288 p.

En introduction, il revient sur le basculement historique d’une société de la rareté vers une société de l’abondance. Particulièrement marqué dans les pays industrialisés au cours des Trente Glorieuses, ce mouvement a ensuite concerné une majorité de pays en développement et s’est traduit par l’émergence d’une classe moyenne mondiale. Mais cette abondance n’a pas profité à tous et a été au cœur de l’accélération des dégradations environnementales. Pour sortir de cette impasse, l’auteur propose de renverser la perspective des économistes s’inquiétant des « limites planétaires » : le défi des prochaines décennies ne sera pas de gérer la rareté mais bien l’abondance des ressources. Un programme d’action de transition écologique est proposé autour de deux axes : la sortie du carbone fossile et la préservation du carbone vivant.

La sortie du carbone fossile

La réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) passe par l’arrêt de la combustion d’énergies fossiles via le développement des énergies renouvelables. L’auteur rappelle que les leviers techniques de la transition énergétique sont aujourd’hui disponibles à un coût compétitif vis-à-vis de leurs alternatives fossiles, notamment pour la production électrique. Cette dynamique ayant émergé depuis la dernière décennie ne se matérialise pas encore par une substitution aux énergies fossiles, la demande d’énergie demeurant croissante à l’échelle mondiale. Toutefois, il s’agit bien d’une révolution en cours dans le secteur énergétique, qui sera désormais une tendance lourde. On pourra toutefois juger l’auteur trop optimiste sur la compétitivité de l’hydrogène renouvelable à court-moyen terme et sur ses potentiels de déploiement au-delà de ses usages actuels dans l’industrie, l’électrification directe apparaissant comme une alternative plus crédible.

Les implications macroéconomiques de la transition énergétique sont l’augmentation des investissements dans les technologies vertes, mais également la décroissance du stock de capital lié aux énergies fossiles. Pour les pays en développement, les énergies renouvelables constituent une opportunité forte leur permettant de satisfaire une demande énergétique aujourd’hui limitée sans passer par l’étape des énergies fossiles (leap-frogging). Au contraire, les pays dépendants de la rente fossile ont beaucoup à perdre dans ce processus. L’Europe et les États-Unis devront réaliser des arbitrages complexes afin d’assurer une décroissance maîtrisée du stock fossile, et en surveiller les conséquences financières et sur l’emploi.

La préservation du carbone vivant

Au-delà de la question énergétique, l’apport de cet ouvrage est d’insister sur un volet plus complexe de la transition écologique : l’évolution des systèmes agricoles et forestiers. L’atténuation du changement climatique nécessite un changement des pratiques agricoles, notamment la réduction du cheptel bovin et la hausse de la part des protéines végétales dans les régimes alimentaires. Combinées aux pratiques agricoles de conservation du sol, ces mesures permettent de réduire les émissions spécifiques du secteur agricole et d’am...

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