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Les firmes multinationales

Schéma général d’aménagement de la France, « Les firmes multinationales », TRP, 34, février 1973, 154 p.

L’existence des firmes de taille internationale n’est pas un fait nouveau. Mais leur irruption en moins de quinze ans sur le marché mondial et particulièrement en Europe est un phénomène si important qu’il serait vain de ne pas en tenir compte dans l’aménagement du territoire : comment rester insensible aux transformations qui s’opèrent de leur fait non seulement dans nombre de branches de l’économie, sur le plan technologique ou dans le domaine financier, dans l’organisation des marchés ou la croissance des firmes, mais aussi au niveau de l’emploi et de la qualification des hommes, à celui des localisations des entreprises et des modalités de
leur fonctionnement.

Il ne s’agit pas de prétendre « découvrir » la stratégie de firmes multinationales ou leur visées particulières : cela ne permettrait pas de prévoir où celle-ci a l’intention de s’installer, où il serait possible d’inciter celle-là à ouvrir une filiale. Le choix n’est pas ici entre Montélimar et Castres, ni même parfois entre la Basse-Normandie ou la Lorraine. Il est le plus souvent en Europe ou non, en France ou ailleurs : les dimensions du raisonnement changent de nature.

Le phénomène multinational, parce qu’il est massif et de nature macroéconomique, échappe largement à l’approche fine de détail et ne s’insère pas avec évidence dans les politiques régionales. Faut-il le négliger pour autant ? Doit-on se désintéresser des effets divers que peut avoir à terme l’installation d’une filiale américaine, par exemple, dès lorsqu’elle décide d’investir dans notre pays ? Doit-on se désintéresser des effets sur notre économie générale et sur certaines économies régionales d’investissements faits dans des pays autres que la France par des entreprises transnationales alors même qu’elles n’ont pas envisagé de s’y installer ? L’interdépendance des économies nationales ne permet pas de sousestimer les modifications qu’introduisent dans les « règles du jeu » la puissance de ces firmes ; ce serait sinon réduire l’aménagement du territoire à sa seule dimension géographique, le confiner à des vues étroitement hexagonales.

La DATAR n’est pas la seule administration concernée par le phénomène multinational : aussi bien d’ailleurs les éléments de réflexion publiés dans ce numéro de « Travaux et Recherches de Prospective » ne forment qu’une étape des études en cours pour son compte. Étape cependant nécessaire : pour situer le phénomène multinational par rapport aux responsabilités et aux soucis qui sont les siens, la DATAR ne pouvait pas ne pas jeter un premier regard d’ensemble sur des faits et des évolutions auxquels elle devra, pour ce qui la concerne, et en liaison avec les autres administrations, faire face de plus en plus fréquemment dans les mois et les années qui viennent.