Partant du réel pour se projeter dans des univers futuristes, la science-fiction, en littérature comme dans le cinéma, permet de rêver, fantasmer ou cauchemarder sur ce que nous réserve l’avenir. Dans beaucoup d’œuvres de science-fiction, les technologies et leurs perspectives d’application jouent un rôle clef, et la miniaturisation aidant, les nanotechnologies offrent des possibilités encore plus grandes aux auteurs et réalisateurs pour développer leurs visions du futur. Parallèlement, scientifiques, entreprises, gouvernements et institutions militaires investissent du temps, de l’énergie et un argent considérables dans ces nanotechnologies. Eux-mêmes construisent des visions de ce que celles-ci pourraient permettre à l’avenir, et cherchent à les concrétiser.
Quelles relations entretiennent ces deux types de représentations ? C’est ce sur quoi s’interroge Bernard Kahane dans cet article. S’appuyant sur divers romans et films emblématiques, il commence par montrer comment la science-fiction met en scène les nanotechnologies, avant de présenter les logiques scientifiques et techniques qui fondent les nanotechnologies. Puis l’auteur s’intéresse plus précisément à l’impact qu’elles pourraient avoir dans le domaine de la sécurité et de la défense (armement, combattants, conflits du futur…). Enfin, il étudie les spécificités des visions du futur des auteurs et réalisateurs de science-fiction d’une part, des acteurs économiques et sociaux impliqués dans l’émergence des nanotechnologies d’autre part, ainsi que leur influence mutuelle. À la différence des auteurs qui jouent de la seule narration, les acteurs engagés dans les recherches et réalisations dans les nanotechnologies sont, selon lui, des « nar-acteurs » qui manient, combinent et hybrident narration et action pour parvenir à leurs fins.
