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La dynamique des valeurs en Europe. Dimensions spatiale et temporelle

Cet article fait partie de la revue Futuribles n° 277, juillet-août 2002

L’exposé de l’évolution des valeurs par grands domaines, dicté par un souci de simplicité, ne doit pas donner à penser que les systèmes des valeurs des Européens sont éclatés, soulignent Pierre Bréchon, Olivier Galland et Jean-François Tchernia. Une lecture transversale de ces enquêtes sur les valeurs témoigne notamment de deux tendances majeures qu’ils exposent ici :
– La première est la montée du postmatérialisme qui, une fois satisfaits les besoins matériels et de sécurité, se traduit par une remise en cause des formes traditionnelles de la morale et une valorisation forte des aspirations telles que l’expression de soi ou la participation sociale.
Cette tendance était très nette à l’époque des Trente Glorieuses. Elle persiste en dépit de la moindre croissance économique. Plutôt que s’opposer, ces aspirations apparaissent complémentaires : nos contemporains aspirent, en d’autres termes, à la fois à la satisfaction de leurs besoins matériels et à celle de leurs aspirations postmatérialistes.
– La deuxième tendance est l’individualisation comme revendication des individus à décider par eux-mêmes de ce qui est bon ou mauvais, plutôt qu’à voir leur conduite et leurs opinions dictées par un ordre supérieur, souvent de nature religieuse.
Cette individualisation des moeurs est une tendance fort ancienne. Elle se différencie toutefois de l’individualisme qui signifierait que l’individu se sent libéré de toute attache, norme ou contrainte sociale, et donc ne ressentirait aucun sentiment d’appartenance à une collectivité. Certes, l’individualisme existe, soulignent les auteurs, bien qu’à des degrés différents suivant que l’on se situe dans des pays de tradition catholique ou protestante, mais il dépend assez largement du sentiment plus ou moins aigu d’appartenance à une communauté qui, tout naturellement, exige un minimum de règles de conduite collectives, voire la reconnaissance d’un  » bien public  » supérieur aux consciences individuelles.
Toutefois, remarquent les auteurs, d’importantes différences (voire divergences) apparaissent au sein de l’espace européen qui se révèlent fortement liées à l’influence toute différente des traditions catholique et protestante. Il en est de même, du reste, des évolutions observées dans les pays de l’Est européen.
Enfin, concluent-ils,  » il existe une dynamique propre à chaque culture nationale « , voire infranationale, bien que, là encore, les pays se distinguent les uns des autres par leur caractère plus ou moins homogène ou hétérogène. En somme, après avoir brièvement analysé la dynamique sociale propre à certains pays caractéristiques, les auteurs concluent, sans sombrer dans le déterminisme, que des différences persistent, fortement marquées par l’histoire longue ; ce qui n’empêche pas les valeurs d’évoluer et, certes à pas lents, de se recomposer.

#Système de valeurs #Union européenne