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France : le mythe du néoconservatisme. Vote Front national et évolution des valeurs

Cet article fait partie de la revue Futuribles n° 227, janvier 1998

La progression du Front national au fil des élections législatives intervenues en France depuis 1986 incite certains à penser que la société française serait marquée par une poussée des valeurs néoconservatistes xénophobes, autoritaires et traditionalistes. Étienne Schweisguth montre que cette interprétation est erronée, que l’humanisme libéral anti-autoritaire tend au contraire à se développer et que le succès du FN résulte du fait qu’il est le seul parti porteur d’une contestation radicale vers lequel se portent tout naturellement les laissés pour compte.
En se fondant sur l’analyse des valeurs par cohortes d’années de naissance – donc sur les effets de génération autrement plus pertinents que les effets d’âge ou de période pour identifier les tendances lourdes – Étienne Schweisguth montre que la société française est marquée par un déclin des valeurs autoritaires et traditionnelles et par l’essor d’un humanisme libéral qui doit beaucoup à l’élévation du niveau d’instruction et pourrait conduire à la diffusion de la « philosophie des lumières ».
En s’appuyant sur des enquêtes de 1978, 1988, 1995 et 1997, menées notamment par le Cevipof, il indique que les performances du FN – loin de témoigner d’une tendance inverse – ne sont que l’expression d’un vote protestataire de la part essentiellement des moins favorisés : en votant ainsi, souligne l’auteur, ils expriment moins une adhésion aux thèses du FN qu’une insatisfaction profonde au regard des évolutions socio-économiques dont ils sont les principales victimes.
Au travers de cette analyse, Étienne Schweisguth explique que le véritable remède à la progression du FN réside davantage dans l’élévation du niveau d’éducation et la réinsertion des exclus plutôt que dans la récupération des thèses du FN par les partis démocratiques de gauche ou de droite.

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